Lors d'un passage à mi-octobre 2008 à Vuisternens-en-Ogoz, c'était l'occasion pour nous de faire de nouvelles photos de l'orgue et de donner des renseignements les plus complets possibles, suite au travaux effectués par la Manufacture de Saint-Martin (canton de Neuchâtel) durant 2007-2008.
Suite donc à ces travaux de la Manufacture d'orgues de St.-Martin (canton de Neuchâtel) et à leur achèvement, nous avons repris le chemin de Vuisternens-en-Ogoz, mi-octobre 2008, pour revoir l'orgue superbe de cette église et en refaire des photos actualisées. Le numéro de décembre (4/2008) de la Revue L'Orgue, Revue indépendante, dont M. François Widmer est le principal rédacteur avec l'aide compétente de M. Georges Cattin du Noirmont, fait paraître d'ailleurs un article au sujet de l'instrument de Vuisternens-en-Ogoz et de son histoire détaillée (nous remercions M. F. Widmer pour les notes qu'il nous a transmises, fin octobre 2008).
Ainsi que cela est déjà dit dans la page principale sur Vuisternens, cet orgue est un instrument de Johann Konrad Speisegger (ou Speissegger), facteur schaffhousois: 1699-1781. Il a été construit pour la Collégiale de Neuchâtel (Convention signée entre la Commission des orgues et le facteur en 1749). Alexandre Speisegger, en 1750, fils de Johann Konrad est nommé titulaire des orgues du Temple du Bas et du Haut (= Collégiale) à Neuchâtel avec la charge de l'entretien des deux instruments. L'orgue du Temple du Haut (= Collégiale) fut achevé en 1753. La Commission ne l'accepta qu'en 1755, estimant que l'organiste pouvait entretenir et achever certains détails de l'instrument, du fait de ses compétences d'organier (il collaborait avec son père Johann Konrad).
Un facteur lausannois (J. J. Zimmer) entretint l'orgue de la Collégiale en 1782, suivi d'un facteur bernois (B. Hauert). En 1834, un facteur de Romont (Pfisterer) reprend cette tâche. Une expertise est demandée au grand Aloys Mooser de Fribourg (1770-1839), auteur du grand orgue de la cathédrale St-Nicolas de Fribourg. Cette expertise de 1836 propose une réfection de la tuyauterie. A. Mooser est mandaté. Il révise l'orgue et ajoute quelques jeux, une Bombarde de 16' à la Pédale et refait les claviers, notamment. Les travaux sont reçus en 1837. Les buffets (Grand-orgue et Positif de dos) sont conservés.
Une Commission se réunit, dès 1861, pour la restauration de la Collégiale de Neuchâtel. La question des orgues est abordée. Divers avis sont demandés et donnés (Friedrich Haas de Lucerne, L. Kyburz de Soleure, Johann Nepomuk Kuhn de Männedorf, Eberhard Friedrich Walcker de Ludwigsburg, et même A. Cavaillé-Coll de Paris). Walcker emporte le marché et dote la Collégiale de Neuchâtel de l'orgue situé dans le transept Nord (1870). Cet orgue restera toujours en place (mais actuellement en 2020, en cours de restauration).
L'orgue de tribune Speisegger/Mooser fut donc vendu à la paroisse de Vuisternens-en-Ogoz, en 1873. L'instrument ne subit pas de modifications majeures, mais il dut être adapté à la tribune de Vuisternens, moins haute (tourelles raccourcies) ! Depuis cette époque, on note une intervention du facteur fribourgeois Savoy (en 1893). L'intervention suivante ne vient qu'en 1938, par un organier de Fribourg du nom de Jean Bénett (il avait repris les Ateliers du facteur Wolf-Giusto). Cette fois les travaux sont nettement plus importants: le buffet du Grand-Orgue est reculé, le pédalier est modifié et étendu à 27 notes, de nombreux tuyaux en bois sont refaits (attaque de parasites), la traction et le tirage des jeux du Positif sont adaptés (du fait du recul du grand buffet). Il s'agit en fait d'un important relevage.
En 1958, M. Jean-Jacques Gramm visite l'orgue de Vuisternens pour le compte de l'Association Suisse pour la Sauvegarde des Orgues Historiques. En 1968, un inventaire de l'instrument est dressé. Une restauration est ensuite confiée au facteur Jean-Marc Dumas de Romont, en 1973, restauration "pilotée" par l'expert fribourgeois bien connu François Seydoux. Il est décidé de revenir à l'état de l'orgue Speisegger/Mooser d'avant 1938. Ce retour à l'orgue, que Mooser avait relevé pour la Collégiale de Neuchâtel, s'imposait en raison du fait que la plus grande partie de la tuyauterie était d'Aloys Mooser et que ce dernier avait respecté de nombreux tuyaux Speisegger, tout en les modifiant cependant. Cet orgue restitué en l'état Speisegger/Mooser fut inauguré en décembre 1976 (par M. F. Seydoux).
Les travaux de 2007-2008 par la manufacture de Saint-Martin (NE) sont décrits dans le détail dans le No 4/2008 de la revue L'Orgue. Il s'agit d'une remise en bon état de marche de pièces mécaniques en bois (très importants travaux d'étanchéité, remise en peau des soupapes, réglage des registres, réharmonisation de chaque jeu avec un la à 437 Hertz à 18° C...). L'orgue de Vuisternens-en-Ogoz, assez profondément modifié par A. Mooser, ne donne que bien peu de renseignements sur l'esthétique musicale du facteur schaffhousois Speisegger. Son buffet, toutefois, reste un remarquable témoin des buffets d'orgue inspirés, au 18ème siècle, par la grande facture du l'Allemagne du Sud.
Composition actuelle (2008) de l'orgue Speisegger/Mooser de Vuisternens-en-Ogoz:
[Cette composition n'a pas varié par rapport à celle que nous avions relevée en 2006. C'est la composition de l'orgue revu par Aloys Mooser, en 1837, sauf pour la Trompette de Pédale qui était, initialement, une Bombarde de 16'].
Clavier 2 (Grand-orgue, CD-c'''): Principal 16', Bourdon 16', Montre 8', Suavial 8', Flûte ouverte 8', Salicional 8', Prestant 4', Flûte 4', Quinte (tuyaux coniques) 3', Fourniture 3-4r 2', Cornet 5r 8' (c'-c''').
Clavier 1 (Positif de dos, CD-c'''): Bourdon 8', Gambe 8', Flûte 4', Octave 2'-4', Flageolet 2'.
Pédalier (CD-e°): Soubassse (ouverte) 16', Octave 8', Trompette 8' (la Trompette est neuve et date de 1976).
Accouplement Posititif / GO à tiroir. Calcant: tirant actionnant une clochette pour avertir le souffleur. Tirasse GO permanente, par doubles soupapes au Grand Sommier, activées respectivement par le clavier de GO ou le Pédalier. Le Pédalier compte 16 notes.
Composition de l'orgue Speisegger de la Collégiale de Neuchâtel (selon contrat de 1749):
Premier clavier (CD-c'''): Principal ou Montre 8', Prestant ou Octave 4', Flûtes 8', Bourdon ou Coppel 16', Nazard ou Quinte 3', Doublette ou Superoctave 2', Fourniture ou Mixture 1' (triplex), Cornet 1' (quadruplex de c'), Trompettes 8'.
Deuxième clavier (CD-c'''): Bourdon ou Coppel 8', Flûtes 4', Flageolets 2', Cimballes 1 1/2' (= 1 1/3') duplex.
Pédalier (CD-e°): Sous Basse ou Bourdon ouvert 16', Octave de Sous Basse ouverte 8'.
[Duplex, triplex, quadruplex signifient que les jeux comptent 2, 3 ou 4 rangs].
[Remarque importante: suite à l'éclairage nécessaire apporté par M. François Widmer, rédacteur de la revue L'Orgue, Revue indépendante, dans l'énoncé de la composition de l'orgue Speisegger de 1749, les termes "Premier clavier" et "Deuxième clavier" ne sont pas à prendre au sens strict de la numérotation ACTUELLE usuelle, mais dans le sens de "Premier clavier = partie instrumentale importante" (donc Grand-orgue) et "Deuxième clavier = partie instrumentale secondaire (donc Positif de dos). Ces claviers, dans la disposition de 1749, étaient bien disposés comme actuellement: à savoir le Premier clavier en bas (correspondant au Positif) et le Deuxième clavier (correspondant au Grand-orgue) en haut !] .
Ci-dessus, en guise de vignette agrandissable de cette page, nous mettons un cliché personnel (fin octobre 2008) de l'orgue Speisegger/Mooser de Vuisternens-en-Ogoz. Cliquer sur l'image pour l'agrandir. Les autres clichés personnels de fin octobre 2008 figurent à la rubrique " photos " attenante à cette page de texte.