En novembre 2012, nous avons visité l'une des plus belles églises de Paris: St-Etienne-du-Mont avec son grand orgue et ses vitraux remarquables (5ème Arrondissement).
A l'origine de cette église, on trouve une basilique des saints apôtres Pierre et Paul fondée vers 510 par Clovis, premier roi des Francs. Clovis lui-même, son épouse Clotilde, sainte Geneviève et plusieurs rois francs y furent ensevelis. Cette église fut le centre d'une vaste abbaye, l'Abbaye Sainte-Geneviève, l'une des plus importantes de France (sainte Geneviève est la patronne de Paris). L'église de l'abbaye servait aussi aux habitants du quartier. Face à l'augmentation de la population, une première église paroissiale, sous le vocable de St-Etienne, fut construite au 13ème siècle. Il n'est reste plus rien. Devenue à son tour insuffisante, elle fut démolie et remplacée par l'actuelle église St-Etienne-du-Mont, nettement plus vaste, construite dès la fin du 15ème siècle et terminée en 1626. L'église actuelle était accolée à l'abbatiale et dépendait de sa voisine. L'Abbaye St-Geneviève fut supprimée à la Révolution et transformée en un Lycée au début du 19ème siècle (actuellement: lycée Henri IV). De l'église abbatiale il subsiste encore le clocher, inséré dans ce lycée. En face, on remarque l'énorme Panthéon, prévu par Louis XV, pour accueillir le tombeau de Ste-Geneviève, mais à la suite de la Révolution, le Panthéon (achevé en 1790) devint une nécropole laïque dédiée aux Grands Hommes de la France. Les restes du tombeau de la sainte et ses reliques furent transférés, en 1803, en l'église St-Etienne-du-Mont, dans une chapelle néogothique située à droite (Sud) de l'entrée du déambulatoire (un vitrail de cette chapelle montre, notamment, cette cérémonie du transfert de la châsse en cette église [voir nos photos]).
Le patron de l'église (St-Etienne) se met au service des apôtres. D'un zèle enflammé, il rend témoignage de la Résurrection de Jésus. Traduit devant le sanhédrin puis lapidé, il devint ainsi le protomartyr. Sainte Geneviève, née en 420, s'est consacrée à Dieu grâce à saint Germain depuis son enfance. Elle s'établit à Paris dont elle assure la protection au moment de l'invasion des Huns. Elle sera l'intermédiaire entre le pouvoir gallo-romain et les tribus barbares qui dominent la Gaule. Elle contribuera à la conversion et du roi Clovis et fonde le culte de saint Denis. Elle meurt en 502 et fut considérée comme la protectrice de Paris. En cette église repose notamment le philosophe et mathématicien Blaise Pascal, à l'entrée de la chapelle axiale consacrée à la Vierge. Les cendres du poète et dramaturge Racine sont inhumées aussi à l'entrée de cette chapelle de la Vierge.
L'architecture: si l'église est encore gothique (commencée vers 1517), l'élégance intérieure de la nef et aussi du choeur est celle des 16 et 17èmes siècles. La façade fut posée en 1610. Le rare et fameux jubé de St-Etienne-du-Mont est à lui seul une pièce unique et extraordinaire par son élégance (il date de 1600). Un tel jubé intact attire à lui seul de nombreux visiteurs, et nous tenions absolument à le voir une fois, ainsi que la resplendissante galerie de vitraux du choeur, notamment (vitraux du 17ème siècle). Le jubé de St-Etienne-du-Mont est doté d'une ornementation de style Renaissance; l'auteur de cette dentelle de pierre n'est pas connu. Le mobilier qui ornait l'église était riche (tableaux, tapisseries). Tout fut dispersé à la Révolution de 1789. Mais on s'attacha, ensuite, à en faire une reconstitution. La chaire (de 1651) est une oeuvre baroque richement ornementée. La chapelle Sainte-Geneviève, au Sud, à l'entrée du déambulatoire, date de 1853 (de style néogothique). Les vitraux de cette chapelle remontent à 1869 et retracent la vie de sainte Geneviève.
La galerie des vitraux dite "galerie du cloître du charnier": il s'agit de l'emplacement d'un ancien petit cimetière auquel on accède par le collatéral droit de l'édifice. Ces vitraux ont été réalisés au début du XVIIème siècle ; il en reste la moitié en place sur les 24 dorigine. Ce sont des peintures sur verre avec des émaux recuits au four, à la différence des autres vitraux de léglise où le verre est coloré dans la masse. Un thème commun les unit : lEucharistie, présence réelle du Christ ressuscité dans lhostie consacrée, et ses préfigurations dans lAncien Testament. Parmi ceux-ci : le vitrail du « Pressoir mystique » illustre la parole du Christ lors du dernier repas de la Cène, reprise à chaque messe, lorsquil fit passer la coupe de vin en disant «ceci est mon sang». Cette galerie est l'un des ensembles de vitraux du 17ème siècle les plus intéressants et les plus beaux de France et même d'Europe. Nous y consacrons une suite globale de photographies des vitraux et de détails intéressants. De la même époque, on doit aussi s'intéresser aux vitraux du choeur, de la croisée et du déambulatoire (ce que nous avons fait également, avec plus de difficulté car ces splendides verrières sont bien haut placées).
La chapelle de la Vierge: la chapelle axiale de l'édifice est accessible depuis le déambulatoire. On y trouve des tableaux du peintre Caminade (1783-1862). Ces peintures sont très remarquables: Nativité, Annonciation, Visitation, mort de la Vierge. La chapelle du Saint-Sépulcre, à droite (sud) dans le collatéral est un endroit qui regroupe trois chefs-d'oeuvre majeurs: une Mise au Tombeau du 16ème siècle provenant de l'église St-Benoît-le-Bétourné (église du 5ème Arrondissement de Paris qui fut rasée au 19ème s.). Cette statuaire est remarquable et entourée de deux peintures aussi intéressantes: à gauche, une Nativité par J. de Santerre, avec Adoration des Bergers (1748) et à droite: un Christ en croix, oeuvre peinte par un anonyme au 17ème s. avec autour la Vierge, St-Jean, St-Louis, Louis XIII et Aristote.
Ainsi, brièvement décrite, St-Etienne-du-Mont est vraiment l'un des plus beaux édifices religieux de Paris possédant un trésor en matière de vitraux du début du 17ème siècle.
Les orgues: voici un grand instrument, l'un des plus considérables de Paris. Son buffet, l'un des plus anciens de Paris, a été construit vers 1631 par un Jehan Buron, maître menuisier. Il est parvenu jusqu'à nous pratiquement dans son état d'origine. Son décor sculpté est exubérant et parfaitement dans le style du premier tiers du 17ème siècle en France. La partie instrumentale d'origine est du facteur Pierre Pescheur et date de 1636 (il n'en reste rien: il y avait environ 30 jeux et 4 claviers). Au début du 18ème siècle, le facteur Julien Tribuot effectue certains travaux sur cet instrument (ce facteur est connu pour avoir travaillé sur l'orgue de la Chapelle du château de Versailles et pour avoir construit l'orgue de l'église de Seurre en Bourgogne, église que nous avons aussi visitée). Un incendie, en juillet 1760, endommagea l'orgue. Le facteur Nicolas Sommer (ou Somer) effectua les réparations nécessaires. C'est grâce aux travaux de ce facteur (son inventaire) qu'il est possible de connaître actuellement la composition de l'orgue de Pescheur. Le facteur Sommer établit un mémoire des travaux à effectuer; ce mémoire fut supervisé par François-Henri Clicquot et l'organiste Louis-Claude Daquin. Les travaux débutés par le facteur Somer ne purent être terminés par lui, en raison de son décès en 1771. C'est Clicquot qui refit une évaluation des travaux à exécuter et termina l'instrument en 1777. L'orgue fut reçu par les musiciens Balbastre et Charpentier. C'est Guillaume Lasceux qui reprit le titulariat jusqu'en janvier 1819. L'orgue fut ensuite réparé par les facteurs Pierre-François Dallery, puis par John Abbey. Mais un remaniement complet de l'instrument intervint par Aristide Cavaillé-Coll, en 1863 (certaines sources indiquent 1873 ?): passage de 4 à 3 claviers; ajout d'un Récit de 42 notes entièrement neuf. L'orgue comprend alors 39 jeux et est inauguré par César Franck. On est un peu loin, alors, des splendeurs de l'orgue français classique de Clicquot. C.-Coll intervient encore en 1873. Le facteur Théodore Puget intervient en 1911, puis la maison nantaise Beuchet-Debierre en 1956 (l'intervention de cette dernière manufacture fut assez radicale, intervention induite par le titulaire de l'époque: Maurice Duruflé). L'orgue est porté à 90 jeux dont 56 dans le buffet original, les autres jeux étant "casés" (pour ne pas dire "bourrés") un peu partout, jusque dans la tour de l'escalier....la console étant placée latéralement dans la galerie Nord, obliquement, +/- face à l'instrument. La Maison Gonzalez intervint encore en 1975 (deux jeux de plus) et réharmonisation. Le facteur Bernard Dargassies relève encore l'orgue en 1991. On peut dire que, par rapport à la taille du buffet d'origine, cet orgue à traction électrique, comprenant 89 jeux sur 4 claviers et pédalier, est à nos yeux "surdimensionné" et bien loin du classicisme français bien présent dans la structure du magnifique buffet du 17ème siècle. Mais il ne s'agit là que d'un avis exclusivement personnel !
Composition du Grand Orgue de St-Etienne-du-Mont à Paris [selon le site: orgues.free.fr/ ]:
Grand-Orgue: Montre 16', Bourdon 16', Montre 8', Principal 8', Bourdon 8', Flûte harmonique 8', Prestant 4', Flûte à cheminée 4', Doublette 2', Grand Cornet V rangs, Mixture II rgs, Fourniture IV rgs, Cymbale III rgs, Bombarde 16', Trompette 8', Clairon 4'.
Positif: Principal 8', Bourdon 8', Flûte creuse 8', Prestant 4', Flûte 4', Nasard 2 2/3', Doublette 2', Tierce 1 3/5', Larigot 1 1/3', Septième 1 1/7', Piccolo 1', Plein-Jeu IV rgs, Trompette 8', Cromorne 8', Chalumeau 4', Clairon 4'.
Récit expressif: Quintaton 16', Principal italien 8', Cor de nuit 8', Gambe 8', Voix céleste 8', Fugara 4', Flûte 4', Nasard 2 2/3', Octavin 2', Tierce 1 3/5', Fourniture IV rgs, Cymbale III rgs, Bombarde 16', Trompette 8', Clarinette 8', Basson-Hautbois 8', Voix humaine 8', Clairon 4'.
Echo expressif: Dulciane 16', Principal 8', Bourdon 8', Salicional 8', Unda Maris 8', Principal 4', Flûte conique 4', Doublette 2', Sesquialtera II, Plein-Jeu IV rgs, Trompette 8', Hautbois 8', Régale 8', Trompette en chamade 8', Clairon 4'.
Pédalier: Bourdon 32', Bourdon 16', Principal 16', Flûte 16', Grande Quinte 10 2/3', Bourdon 8', Principal 8', Flûte 8', Grande Tierce 6 2/5', Quinte ouverte 5 1/3', Grande Septième 4 4/7', Principal 4', Flûte 4', Tierce 3 1/5', Nasard 2 2/3', Flûte 2', Fourniture IV rgs, Bombarde 16', Trompette 8', Clairon 4', Bassons 32', 16', 8' et 4'.
Accessoires: accouplements tous claviers en 16', 8' et 4'. Tirasses: Grand-Orgue, positif, Récit, Echo en 8'. Tirasses Positif et Récit en 4'. Tremblants: Récit et Echo. Crescendo général. Combinaisons ajustables électroniques. Le buffet est classé aux Monuments historiques. Les claviers comptent 61 notes et le pédalier 32 notes. La transmission est électrique.
Orgue de choeur, instrument Puget de 1902 [composition selon le site: orgues.free.fr/ ]:
Grand-Orgue: Bourdon 16', Montre 8', Flûte harmonique 8', Salicional 8', Prestant 4', Trompette 8'.
Récit expressif: Cor de nuit 8', Viole de Gambe 8', Voix céleste 4', Flûte octaviante 4', Fourniture IV rgs, Basson-Hautbois 8'.
Pédalier: Soubasse 16', Basse 8'.
Accessoires: Réc./GO en 8', Réc./Réc. en 16', Tirasses: GO, Réc. Trémolo au Récit. 5 combinaisons fixes et une combinaison libre. Appel Trompette et mixture.
Liens Internet utiles:
- https://www.saintetiennedumont.fr/eglise/les-vitraux/ (les vitraux du déambulatoire),
- https://www.saintetiennedumont.fr/ (lien paroissial),
- http://www.musiqueorguequebec.ca/orgues/france/setiennemp.html (site canadien),
- http://www.musiqueorguequebec.ca/orgues/france/setiennemp1.html (photos du lien ci-dessus),
- http://paris1900.lartnouveau.com/paris05/st_etienne_mont.htm (beau lien pour l'extérieur),
- et pour l'intérieur aussi: cliquer ici ,
- encore un lien utile: cliquer ici ,
- http://orgue.free.fr/a5o7.html (composition grand orgue) et l'orgue dechoeur: http://orgue.free.fr/a5o7bis.html ,
- https://www.youtube.com/watch?v=XHauzgT2o1M (improvisation de T. Escaich au GO, titulaire actuel),
- vidéo de présentation du lieu (sauter la publicité): voir ici.
- St-Etienne-du-Mont est décrite dans le superbe site du Patrimoine: voir ici, en espérant que ce lien tienne ! Trois volets, dont 2 en plus pour montrer les vitraux superbes !
- le grand orgue dans la Base mondiale des Orgues: voir ici et aussi ici pour l'orgue de choeur (plusieurs photos agrandissables).
- dans l'Inventaire des Orgues de France (en cours de rédaction en 2022), on trouve le grand orgue et aussi d'orgue de choeur (les 2 avec de très belles photos).
Ci-dessus, en guise de vignette agrandissable de cette page, nous mettons un cliché personnel (nov. 2012) du grand orgue de l'église St-Etienne-du-Mont à Paris. Les autres clichés personnels de cette église parisienne figurent dans les deux rubriques suivantes: "photos: église, orgues" et "photos: vitraux, divers", rubriques attenantes à cette page de texte.
Monographie relue, corrigée, améliorée début octobre 2022.