En novembre 2012, nous avons pu visiter, en déplacement à Paris, l'église de Saint-Louis-en-l'Île, certainement l'un des plus beaux sanctuaires de Paris et situé dans le 4ème Arrondissement. Ce qui frappe le visiteur, c'est la modestie extérieure de cette église, dépourvue de parvis: il faut franchir une porte du bas-côté Nord pour entrer. L'extérieur est enveloppé de filets pour protéger les passants des chutes de pierres, car la façade donnant sur la rue attend toujours une restauration. Par contre, une fois la porte franchie, on est complètement saisi par la beauté baroque intérieure de ce lieu et sa grande richesse en oeuvres d'art diverses.
Un peu d'histoire: en 1600, un Maître couvreur du nom de Nicolas le Jeune aurait fait construire une chapelle St-Nicolas. Une chapelle N.-Dame fut construite vers 1616, sur l'emplacement actuel. En 1634, cette chapelle est dédiée à Saint-Louis et prend le nom de Saint-Louis-en-l'Île-Notre-Dame. En 1664, l'édifice actuel est commencé. Les plans sont de l'architecte François Le Vau, mais seul le choeur sera édifié exactement selon ses plans. En 1702, l'architecte Le Duc prit la succession de Le Vau, mais il ne put livrer que les plans: l'architecte Jacques Doucet, succédant à Le Duc, poursuivit l'ouvrage. L'édifice fut consacré en juillet 1726 sous le vocable actuel de St-Louis-en-l'Île. Les travaux furent terminés en 1725. L'église est orientée Est-Ouest, mais le grand portail Ouest ne fut jamais réalisé. On entre donc par un portail provisoire donnant directement sur la rue et dans le collatéral Nord. L'extérieur est très sobre. Le campanile prévu fut foudroyé en 1740 et remplacé par un clocher pointu et ajouré plutôt original à Paris (édification en 1765). Intérieurement, l'église est très belle et comprend 3 travées, un transept non saillant, une belle coupole de croisée et un choeur court entouré d'un déambulatoire. La chapelle axiale du déambulatoire est celle dédiée à Saint-Louis. La voûte est en plein cintre avec des arcs doubleaux pour la renforcer. Une très grande harmonie se dégage de cette nef. La décoration sculptée est réalisée sur des dessins de Jean-Baptiste de Champaigne (1631-1681, neveu de Philippe de Champaigne). Si le 17ème siècle accentue les points structuraux de l'église avec goût, le 19ème s., par contre, entraînera une surcharge du décor intérieur. Sous la Révolution, ce lieu fut envahi, dévasté, l'orgue fut brisé et les tuyaux fondus pour en faires des balles. L'île Saint-Louis devient l'île de la Fraternité. Les choses seront rétablies vers 1802. L'église Saint-Louis-en-l'Île est très riche en oeuvres d'art de grande valeur. Il était impossible de tout photographier. Cette église est un bon exemple de ces paroisses où la richesse est venue de mécènes, de nobles, de bourgeois. Ils offraient souvent des oeuvres d'art remarquables en ex-voto. L'abbé Louis-Auguste-Napoléon Bossuet qui fut curé de cette paroisse (de 1864-1888) était aussi mécène, cultivé et passionné d'oeuvres d'art et collectionneur. On lui doit une grande partie des tableaux et objets précieux qui décorent l'édifice [Louis-Auguste-Napoléon Bossuet était le petit neveu de Jacques-Bénigne Bossuet, écrivain et prédicateur bien connu]. La Paroisse de Saint-Louis-en-l'Île met à disposition, à l'entrée de l'église, de la documentation pour permettre au touriste de se retrouver dans son parcours au milieu de ce qui est, il faut bien le dire, un véritable et fantastique musée. Personnellement, il nous était impossible de tout photographier. Nous nous sommes concentré sur les fonts baptismaux avec sa fameuse représentation du baptême du Christ par Bouzonnet (ou Antoine Stella, 1634-1682) et sur les fameux huit panneaux de la Vie du Christ, panneaux peints par un anonyme hollandais du 16ème siècle (un véritable chef-d'oeuvre). Nous avons aussi mis en évidence quelques beaux vitraux du 19ème siècle, dont un porte la signature de Champigneulle.
Les orgues: dans cette église trône en tribune, depuis 2004, un orgue magnifique, oeuvre de la Manufacture de Bernard Aubertin. L'église disposait d'un orgue, vers 1750, instrument qui fut entièrement relevé par le fameux facteur Clicquot. L'époque révolutionnaire fut fatale à cet instrument. En 1888, l'abbé Bossuet (voir ci-dessus dans nos notes) fit installer un nouvel orgue à ses frais. On a une description de l'instrument prévu. Finalement, on ne put faire l'acquisition que d'un petit orgue issu des ateliers Merklin (15 jeux). En 1923, on peut enfin loger un grand orgue Charles Mutin de 34 jeux sur 3 claviers et pédalier. En 1977, l'orgue Mutin est devenu injouable. Un projet est élaboré par la Ville de Paris, en 1983. On souhaite construire un grand orgue qui puisse attirer les organistes de toute l'Europe en permettant de faire des enregistrements de qualité et d'interpréter le répertoire baroque allemand. En juin 1999, onze facteurs sont sur les rangs, alors, qu'au début, il avait été apparemment prévu de confier cette réalisation au célèbre Jürgen Ahrend. Mais la Ville de Paris devait procéder par appel d'offres, ce qui, semble-t-il, au début, n'avait pas été envisagé. La Manufacture Aubertin de Courtefontaine remporte la mise pour la qualité esthétique de sa proposition et pour la parfaite adéquation de son projet à l'idéal sonore de J.S. Bach. La construction de cet instrument prit 6 ans. Cet orgue est une première dans Paris: il est construit entièrement selon l'esthétique pré-romantique baroque de l'Allemagne du Nord, car les instruments fameux, de qualité, et d'esthétique française sont effectivement très nombreux dans Paris. L'orgue fut inauguré en juin 2005, en obéissant au projet du facteur Aubertin. L'orgue de choeur est un instrument de J. Gutschenritter de 1965. Il compte 2 claviers et un pédalier et 20 jeux. Il est à traction électrique.
Composition du grand orgue Aubertin en tribune [selon le site suivant: //orgue.free.fr/ ]:
Positif de dos: Montre 8', Bourdon 8', Quintaton 8', Prestant 4', Flûte à cheminée 4', Flageolet 2', Flûte 1 1/3', Sesquialter II rangs, Mixture IV rangs, Dulciane 8', Allemande 4' [voir note ci-dessous].
Grand-Orgue: Principal 16', Octave 8', Gambe 8', Flûte 8', Prestant 4', Flûte conique 4', Quinte 3', Octave 2', Cornet V rgs, Mixture IV-VI rgs, Basson 16', Trompette 8'.
Récit: Bourdon 8', Principal 8', Traversière 8', Unda Maris 8', Octave 4', Flûte 4', Nazard 3', Traversine 2', Octave 2', Terz (Tierce) 1 3/5', Quinte 1 1/3', Sifflet 1', Mixture III rgs, Fagott 16', Voix humaine 8'.
Pédalier: Principal 16', Violon 16', Bourdon 16', Quinte 12', Octave 8', Bourdon 8', Prestant 4', Flûte 2', Mixture IV rgs, Dulciane 32', Buzène 16' (autre terme pour Posaune ou Trombone), Trompette 8', Cornet 4'.
Accessoires: accouplements = Réc./GO, GO/Réc. à fourchettes. Accouplement à tiroir: Pos./GO. Tirasse: GO. Tremblant I et II. Tremblant II. Appel anches. "Boîte humaine". Claviers de 56 notes et pédalier de 30 notes. Transmissions mécaniques.
[Note sur l'Allemande 4': réponse de B. Aubertin à notre question = " Ce troisième 4' est en fait un bourdon harmonique ; la 1ère octave est composée de tuyaux ouverts de longueur normale mais avec des bouches extrêmement hautes, à partir du 2ème do jusqu'au dernier sol les tuyaux sont bouchés avec des calottes soudées et leur longueur est le triple d'un bourdon normal. On ne peut pas dire qu'ils soient octaviants comme une flûte ouverte parce que les bourdons émettent très peu d'octaves mais beaucoup de quintes (troisième harmonique) et autres harmoniques impairs, ce qui explique le pourquoi de la triple longueur. Il s'agit d'un jeu pittoresque qui a une attaque percutante et dont le son fait penser à une flûte des Andes et l'extrême aigu à une flûte harmonique ouverte " ].
Composition de l'orgue de choeur [selon le site: //orgue.free.fr]:
Grand-Orgue: Bourdon 16', Bourdon 8', Montre 8', Flûte harmonique 8', Flûte douce 4', Prestant 4', Nasard 2 2/3', Doublette 2', Tierce 1 3/5'.
Récit: Gambe 8', Voix céleste 8', Flûte 8', Flûte 4', Fourniture IV rgs, Basson-Hautbois 8', Trompette 8'.
Pédalier: Soubasses 16', Bourdon 8', Flûte 8', Flûte 4'.
Accessoires: accouplements = Réc./GO en 8' et 4', GO/GO en 4', Réc./Réc. en 16'. Tirasses: GO, Récit en 8' et 4'. Expression au Récit. Appel d'anches au Récit. Appel Mixtures. Appel Tutti. Claviers de 56 notes. Pédalier de 30 notes. Transmissions électriques.
Liens Internet divers:
- https://www.saintlouisenlile.catholique.fr/ (lien paroissial),
- https://sites.google.com/site/orguesdesaintlouisenlile/ (autre site sur l'orgue),
- http://www.musiqueorguequebec.ca/orgues/france/slouisilep.html (site canadien),
- http://www.musiqueorguequebec.ca/orgues/france/slouisilep1.html (site canadien, photos),
- https://www.flickr.com/photos/checco/3135382159/ (belle vue de l'orgue),
- https://fr.wikipedia.org/wiki/Louis_IX (Louis IX ou Saint Louis),
- autre lien pour B. Aubertin: voir ici,
- https://www.youtube.com/watch?v=WRiQbR_hS4A (audio-vidéo de qualité moyenne),
- https://vincentthe2.blogspot.com/2007/09/saint-louis-en-lle-orgue.html (autre façon de voir l'orgue, console, tirants),
- le titulaire actuel en 2019: voir ici,
- le grand orgue (avec l'orgue Mutin précédent également): cliquer ici, et l'orgue de choeur: cliquer ici .
- le très beau site du Patrimoine en France (va-t-il rester ??): voir ici,
- les orgues de ce lieu dans la base mondiale des Orgues: le grand orgue et l'orgue de choeur.
- dans l'Inventaires des Orgues de France (en rédaction en 2022): le grand orgue et l'orgue de choeur.
Ci-dessus, en guise de vignette agrandissable de cette page, nous mettons un cliché personnel de l'orgue Aubertin de l'église Saint-Louis-en-l'Île à Paris (voyage de novembre 2012). Les autres clichés personnels figurent dans la rubrique "photos" attenante à cette page de texte.
Monographie relue, corrigée, améliorée en octobre 2022.