Le 24 février 2009, nous avons visité de le Temple de Travers, et sutout son orgue F. Goll datant de 1897. [Merci à Mme Santos de nous avoir ouvert le Temple].
Eléments historiques sur ce Temple: consulter notamment le lien suivant (+ un lien malheureusement détruit, anciennement: la Vie Protestante), dont voici un résumé, ci-dessous.
" Léglise de Travers, dédiée à Saint Côme, auquel sajoute Saint Damien dès le XVe siècle, apparaît sur la liste des églises paroissiales de 1228, avant dêtre annexée par le prieuré Saint-Pierre de Môtiers. Lanalyse archéologique des murs sud et est, en 1996, permet de reconstituer les phases de lévolution du bâtiment depuis le Moyen Âge. Le mur de chevet, à lest, montre les étapes les plus anciennes: les parties basses dun premier choeur, remontant au XIIIe ou au XIVe siècle. Ce choeur était plus étroit que la nef et désaxé par rapport à elle, ce qui signifie quil a certainement remplacé un choeur plus ancien. Les traces de petites baies originales ont été repérées de part et dautre dune fenêtre gothique du XVe ou du début du XVIe siècle. Le mur sud du choeur conserve la piscine liturgique médiévale; il a été renforcé dun épais doublage extérieur en talus. Le mur sud de la nef, a quant à lui, été reconstruit au XVe ou au début du XVIe siècle. Après la Réforme, le temple a subi un important agrandissement obtenu par le déplacement vers le nord du mur septentrional et la reconstruction dun choeur quadrangulaire voûté dogives. Une plaque commémorative portant la date de 1628 laisse à penser que cest cette année-là queut lieu la reconstruction. Le clocher porte la date de 1632. Après un incendie en 1865, la tour fut exhaussée dun étage et la flèche rebâtie. Le rez-de-chaussée en pierre de taille est percé au sud dune porte en plein cintre, encadrée de pilastres, surmontée dun fronton brisé ".
L'orgue Friedrich Goll (1897 / 1914 / 1926).
Un important article concernant cet instrument, à caractère romantique / symphonique, a été présenté dans le périodique L'Orgue - Revue Indépendante, No 2, juin 2005 (pages 20 à 29), sous la signature de Monsieur François Comment, organiste et spécialiste de l'orgue romantique. Grâce à ce riche article, nous retraçons, ci-dessous, l'essentiel de l'histoire de l'orgue Goll du Temple de Travers, un orgue qui, maintenant, est vraiment entré dans le patrimoine organistique de la Suisse romande.
C'est en 1897 que l'orgue du facteur suisse Friedrich Goll (1839-1911) a été construit à Travers. Goll, originaire de l'Allemagne du Sud, s'était formé, notamment, auprès du facteur Joseph Merklin à Paris. La manufacture de F. Goll, à Lucerne, fut établie en tant que reprise des ateliers du facteur Friedrich Haas (1811-1886). F. Goll inaugura, avec le Temple de Travers, une série de contrats de facture d'orgue dans le canton de Neuchâtel. Les instruments Goll neuchâtelois ont pratiquement tous disparu à l'exception, à notre connaissance, de celui qui nous occupe, à Travers, celui du Temple de La Chaux-du-Milieu (datant de 1915) et celui du Temple de La Brévine (datant de 1910).
L'orgue de Travers fut installé en 1897, comme opus 172 de la Manufacture Goll. Le buffet est de style néo-Renaissance, en sapin, peint couleur chêne. Le buffet contient le sommier diatonique du Grand-Orgue (premier clavier) et n'a que 1,5 m de profondeur environ. Le sommier du second clavier (Récit) et les jeux de la Pédale sont répartis dans une niche de la tour de façade de l'église. Le Récit est au second clavier avec une boîte expressive logée dans la tour. Les jeux qui correspondent à ce second clavier forment donc un Echo aux jeux du premier clavier. La console en chêne, tournée vers la nef, est une console typique de Goll de la fin du 19ème siècle (tirants ornés de pastilles en ivoire et alignés en deux rangées, de part et d'autre des claviers). Le Pédalier est plat. Les pédales de combinaison sont en fer, et la pédale d'expression (Echo) est située à droite de la console, juste au-dessus des touches du Pédalier. On remarque, outre la plaque de signature de l'instrument, une autre petite plaque, située entre les claviers, et indiquant: "Patent 7852". Il s'agit d'un brevet suisse, déposé par F. Goll, en 1894, portant sur le système de traction de l'instrument. Les soupapes de chaque tuyau, en forme de cônes, ne sont pas ouvertes par un système mécanique, mais par de petits soufflets cunéiformes placés à l'intérieur du sommier et commandés par des tubulures en laiton, à l'origine (tubulures en laiton remplacées par les habituels tubes en plomb de la traction pneumatique, probablement lors du relevage effectué par la Manufacture Goll en 1926). L'orgue de Travers est donc un petit instrument à traction pneumatique tubulaire avec sommiers à cônes. Le sommier à cônes fut abandonné par Goll, par la suite, au profit du sommier pneumatique à membranes (dès 1902).
° [Pour les différents types de sommiers en facture d'orgue, voici une explication tirée de Wikipedia: il est composé, généralement, de bas en haut: dune laye, réserve dair étanche qui contient les boursettes et les soupapes; dun châssis composé de gravures séparées par des barrages, elles correspondent aux notes du clavier. Sur le châssis est fixé la table sur laquelle coulissent les registres entre les faux registres qui leur servent de guide; le tout est surmonté de chapes qui reçoivent les pieds des tuyaux. Il y a généralement autant de sommiers que de claviers, mais sur les très gros instruments, les jeux dun même clavier peuvent être répartis sur plusieurs sommiers].
° [Explication du terme diatonique: cliquer ici . Explication du terme chromatique: cliquer ici ].
L'orgue F. Goll du Temple de Travers a donc une valeur historique évidente, si l'on pense que sur les quelque 600 instruments construits par ce facteur (entre 1868 et 1928, année de la faillite), environ 10 % seulement ont survécu. Ceux construits selon le fameux Brevet No 7852 ne sont plus que quelques unités en Suisse. Après des transformations dans l'église de Travers, l'orgue démonté est réinstallé en 1914, et amélioré. C'est de cette époque que date la boîte expressive du second clavier, boîte qui ferme la niche de la tour contenant les jeux du second clavier et de la pédale. Du coup, le Pédalier est aussi devenu expressif et fonctionne en "Echo" avec le clavier 2. Lors de ce relevage, la Manufacture Goll ajouta les accouplements Octave grave II/I et Octave aiguë II/I. Ces accouplements sont commandés par des tirants placés au-dessus du second clavier.
Un nouveau relevage eut lieu en 1926 (toujours par la Manufacture Goll). A cette époque, Goll avait atteint le summum de l'orgue symphonique avec l'immense instrument de l'église abbatiale d'Engelberg (1877, puis 1925). L'orgue de Travers fut revu, modestement, mais efficacement, dans le sens de l'évolution des goûts musicaux de cette époque. La Gambe du premier clavier passa au second clavier en prenant la place du Salicional, lequel descendit du second au premier clavier ! M. François Comment explique ce changement ainsi: la Gambe, de sonorité un peu âpre, gagna en douceur en passant au Récit expressif, le Salicional, autre jeu gambé, plus doux arrivant au premier clavier non expressif. La Manufacture Goll, toujours en 1926, ajouta un Hautbois (en zinc) sur un sommier placé directement derrière les jalousies de la boîte expressive. Cette opération de "symphonisation" de l'orgue de Travers, en 1926, sans dénaturer l'orgue, en augmenta les possibilités tout en restant dans l' "esprit" de l'orgue original de 1897. Les transformations de 1926, faites par F. Goll à Travers, avant faillite, furent les dernières. Les entretiens suivants se bornèrent à maintenir le bel instrument en état de marche (Manufactures Kuhn, puis Felsberg, puis Saint-Martin). L'orgue du Temple de Travers, tout comme celui de Vaulruz (canton de Fribourg), devient donc un témoin précieux et rare de la facture de Friedrich Goll d'avant 1928, date de la faillite de l'entreprise, et de la séparation des fils de Goll, Karl et Paul.
L'orgue de Travers est donc un instrument remarquable, montrant, dans un orgue de petites dimensions, l'évolution de l'orgue romantique à symphonique, son apogée se trouvant, en Suisse, probablement à Engelberg. Dès les années 1930, déjà, un début de retour à la facture à tendance baroque (traction mécanique) se manifeste. C'est en cela qu'un orgue comme celui de Travers, dont les dernières retouches remontent à 1926, est important au plan du patrimoine organistique régional et très probablement suisse.
Composition de l'orgue F. Goll du Temple de Travers:
Grand-Orgue (clavier 1, 54 notes): Principal 8', Bourdon 8', Salicional 8' (transféré du clavier 2), Flauto dolce 8', Octave 4', Mixtur 2-3 rangs 2 2/3'.
Récit expressif (clavier 2, 54 notes): Gamba (transférée du clavier 1), Lieblich Gedeckt (Bourdon aimable) 8', Aeoline 8', Voix céleste 8', Flauto amabile 4', Oboe (Hautbois, ajouté par Goll en 1926) 8'.
Pédalier (27 marches): Soubasse 16', Octavebasse 8'.
Trémolo. Accouplements: II/I, I/P, II/P, II-aigu/I, II-grave/I. Trois combinaisons fixes: P, MF, F.
[Consulter notre rubrique sur les jeux de l'orgue et leur terminologie: cliquer ici ].
Quelques liens à consulter:
- http://peter-fasler.magix.net/public/NEProfile2/ne_travers_ref.htm (lien pour l'orgue de Travers),
- le Creux-du-Van symbole du Val-de-Travers: cliquer ici .
- https://hls-dhs-dss.ch/fr/articles/002881/2016-10-26/ (histoire de Travers),
- différentes vues de Travers: le Temple, pont sur l'Areuse à Travers: voir ici, vue générale du village: voir ici.
- tour du Village de Travers (diaporama, COPYRIGHT): voir ici.
Ci-dessus, en guise de vignette agrandissable de cette page de texte, nous mettons un cliché personnel de l'orgue F. Goll (1897) du Temple de Travers. Les autres clichés personnels figurent dans la rubrique " photos " attenante à cette page de texte.
Page revue et corrigée au plan des liens en décembre 2020.